Bertille, pâle, se retourna doucement. Une magnifique épeire fasciée sanglotait devant elle.
Bertille déglutit, le champignon bolet vint à sa rescousse.
— Madame, pourquoi une belle araignée comme vous n’est plus dans sa toile ?
— J’ai été chassée par des sauvages !!! J’avais une belle toile, bien située dans les branches d’un beau châtaignier, sniff, mais des créatures sans cœur m’ont chassée, sniff. C’était si bien situé, plein d’insectes se prenaient dans ma toile. Je vivais une vie opulente. J’aurais pu devenir obèse si on n’avait pas détruit mon domicile.
— Là là, dit Bertille en lui tapotant la deuxième patte gauche. Vous retrouverez un bel endroit pour faire votre toile, ne vous inquiétez pas…
— Mais qui vous a chassé demanda l’amanite ? Dans un arbre il y a de la place pour tout le monde ?
— Des.. des.. des champignons noirs ! L’araignée éclata définitivement en sanglot.
— Noirs? Comme les trompettes de la mort ? Mais elles sont si agréables à vivre pourtant…
— NON ! C’était des Pleurotus cornuscopiae !!
— Des pleurotes ? Mais elles ne sont pas de cette couleur d’habitude.
Décidément, il se passe des choses vraiment bizarres dans cet arbre…
Extrait de “l’encyclopédie de la forêt mystérieuse ” N°56 auteur anonyme
Complainte de l’araignée délogée de sa toile :
O toile O fil d’argent,
Maison de soie, et garde-manger,
Vous que de mes huit pattes j’ai tissé
Adieu toile, adieu mouches grasses,
Il ne me reste plus que mes huit yeux pour pleurer