Chapitre 6 : la diversion  

Après s’être suffisamment éloignée, notre petite troupe essaya de définir un plan d’action.  

On rentre dans le tas cria Bertille !   

— Tiens-tu tellement à finir en omelette ? Cria le bolet. Non il faut essayer de négocier.  

— Ou créer une diversion. Suggéra l’amanite.  

Le bruit d’un battement d’aile, au-dessus de leurs têtes mit fin au débat.   

Une pie noire, blanche aux reflets bleus, atterrit devant eux. Elle jaugea le petit groupe et leur sourit froidement.  

— Bonsoir Chers CFE, j’ai cru entendre une dispute entre vous et les pleurotes du châtaignier. Rien qui n’engage la sûreté de notre chère forêt, j’espère ?  

Son ton mielleux ne rassura pas Amanite et Bolet, les pies sont rarement désintéressées. Bertille hésita, pouvait-on vraiment faire confiance à cet oiseau ?  Elle tenta le tout pour le tout.  

— Nous devons pénétrer dans le creux de l’arbre pour voir ce qui s’y trame, mais les Pleurotes nous barrent l’accès. Nous… Nous aurions besoin d’une diversion, vous pensez vraiment pouvoir nous aider ?   

— je serais ravie de rendre service, dans l’intérêt général bien sûr.   

Un frisson parcourut le groupe, Bertille regrettait déjà sa demande. La pie s’envola, prit de la hauteur…. Et tomba en piqué, bec en premier, sur les pauvres Pleurotes. Ce fut une pluie sanglante de plume et de morceaux de champignons. La pie, tel un samouraï, sabrait les chapeaux des pleurotes. Bertille était effarée, elle voulait juste une diversion, pas un bain de sang. L’oiseau était sans pitié, mais les pleurotes ne se laissaient pas faire, elles se jetèrent sur ses ailes pour l’immobiliser au sol, la pie se cabra sous le poids des champignons. Rua comme une folle pour dégager ses ailes, arrachant les pleurotes du pied de l’arbre et libérant l’entrée.   

— La voie est libre maintenant, dit Bolet amèrement, dépêchons-nous, avant que cet oiseau de malheur ne se retourne aussi contre nous.  

Bertille eut un pincement au cœur pour les pauvres pleurotes, mais elle devait sauver son arbre.  

La troupe se précipita vers la brèche en courant, l’odeur de champignons blessés était écœurante. Ils réussirent à se faufiler entre les plumes et les morceaux de chapeaux.   

Bolet ouvrait la marche avec la lanterne, éclairant les parois. Bertille était tout derrière et ne distinguait que les reflets orangés sur le bois. Le chemin était étroit, elle se tenait aux murs froids et humides, ses pieds s’enfonçaient légèrement dans le bois rongé par l’humidité et le temps. Elle sentit comme des plaies purulentes dans le bois, elle regarda ses doigts, ils étaient tachés d’une matière noire, puante et collante. Préoccupée, elle ne fit pas attention et trébucha sur l’amanite, qui trébucha sur le bolet, qui tomba dans une grande salle, le chapeau dans la poussière.